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FIGB recrute




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18 mars 2011 5 18 /03 /mars /2011 21:27

 

Bon, une nouvelle mission de finie, nomdedjeu. Hé bien, je suis claqué, mais ça fera du bien au porte-monnaie.

Puis pas que, parce que quand même, les missions sur le terrain, quand le terrain est la mangrove sénégalaise, c'est rien chouette, comme dirait plus personne.

Pourquoi c'est chouette ? Ben comme d'hab : déjà, on est au milieu des palétuviers, sans voir plus de trois péquins par jour, à part l'équipage, quand on bosse pas, on peut écouter Zazie dans le métro les pieds dans l'eau, ou prendre des photos pour se la péter, ou se la péter en chopant des Pseudotolithus elongatus à la ligne, et pas qu'un, en plus, mais pas loin d'une bonne demi-douzaine.

 

Puis y'a l'équipage, les histoires qu'on entend pour la quatrième fois en quatre missions, mais qui sont toujours marrantes (le coup du collègue qui rentre en France avec une valise de mangues, qui se rend compte arrivé chez lui qu'il s'est trompé de valise à l'aéroport, qui appelle et qui entend une dame soulagée dire « haaaa bé vous nous rassurez, on a un monsieur malien qui réclame qu'on lui paye un billet de retour, il dit qu'il a été marabouté et qu'on lui a transformé tous ses habits en mangues et qu'il doit rentrer se faire démarabouter », ou son récit de comment il s'est fait cracher dans l'oeil par un cobra qu'il essayait d'assommer (enfin, à côté de l'oeil), ou encore plein d'autres histoires entre la Côte d'Ivoire et le bois de Boulogne), les petits compliments du matin « nomdedjeu t'es un vrai breton, toi ! Comment tu fais pour être en ticheurte ? -Ben on est au Sénégal, quoi, il fait chaud... », les expressions dont on se dit qu'elles font classe et qu'il faudrait penser à les placer dans les prochaines conversations pour faire vrai mec (genre « toui de toui », que j'aime beaucoup), les constatations « ha, le soleil s'est couché, c'est l'heure de l'apéro », les exclamations de respect « ho putain, un pet de sept secondes, ça doit être un record, je comprends pas comment tu fais pour pas faire dans ton froc »...

 

Puis y'a la bouffe, parce que le barracuda fraîchement pêché version thiboudien c'est pas dégueulasse, faut dire.

 

Puis y'a le boulot : trier des bassines pleines de poissons gluants, voir apparaître sous un tas d'ethmaloses le rostre d'un Tylosurus crocodilus, ou les écailles colotées d'un tilapia, c'est chouette, un peu comme une chasse au trésor dans une bassine de poissons gluants. Expliquer au nouveau que c'est à LUI de compter les poissons quand y'en a des centaines, ou de prendre des notes quand vous êtes fatigué ou que c'est juste un gros tas de sardinelles et de Gerres, c'est bien aussi.

Puis regarder dans la bouche d'un Hemiramphus brasiliensis (je crois), par hasard, parce que j'aime bien regarder la bouche des poissons (c'est rigolo, quand on tire sur la mâchoire inférieure, on sait jamais à quoi ça va ressembler une bouche de poisson), et trouver que la langue a une drôle de tête, parce qu'elle a une tête, et disséquer la tête du poisson pour en extraire le parasite le plus classe du monde, c'est la classe.

 

Alors oui, c'est un parasite qui bouffe la langue du poisson et prend sa place dans la bouche du poisson. C'est tout bonnement génial la nature, on penserait jamais à inventer un truc aussi crade, pour tout dire, ça a illuminé ma journée et le reste de la mission.

 

 

parasite1.jpg

 

On voit pas bien ?

 

parasite2.jpg

C'est pas tellement mieux, ok.

http://img825.imageshack.us/img825/2050/parasite3.jpg

La classe, quand même.

 

 

Allez, on remet ça en mai.

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 20:42

En vérité, je vous le dis mes amis, l’électricité est quelque chose de bien merveilleux, et je suis sûr que la plupart d’entre vous ne se rend pas compte à quel point. Personnellement, il m’aura fallu un long séjour au Sénégal pour m’en rendre compte, mais là, ça y est, c’est bien assimilé. L’électricité, c’est vraiment chouette, c’est pas juste son absence qui est chiante.
Depuis quelques temps, au Sénégal, la situation électrique commence à être pénible. La semaine dernière, par exemple, dans mon quartier qui est pourtant relativement privilégié, on a eu une coupure de 6h du matin jusqu’à 23h30 le jeudi, et une deuxième coupure de 7h à 20h le vendredi. C’est très long. C’est très chiant.

Et encore, j’ai de la chance : depuis quelques semaines, mon boulot me permet de profiter du courant plusieurs heures par jour, même en cas de coupure, grâce à un onduleur et des batteries qui tiennent longtemps. Le côté frustrant, c’est que les collègues des bureaux d’à côté n’en ont pas, et qu’on se retrouve seuls du bâtiment à bosser quand il y a (souvent, donc) coupure.

Des amis sont moins chanceux : ils n’ont chez eux que 3-4 heures de courant par jour, ou plutôt par nuit , d’ailleurs. Ce qui est utile en saison chaude, quand on a du mal à dormir sans clim ou ventilo, mais là ne sert qu’aux frigos (c’est déjà ça). En plus, ils habitent dans des maisons situées au-dessus des réserves d’eau (ce qui est sans doute illégal, mais bon, ça c’est pas de leur faute), du coup, sans électricité, pas de surpresseur, et donc pas d’eau. Bon, dans leur malheur, ils sont malgré tout mieux lotis que d’autres : ils ont les moyens de payer les 50.000 francs (75€) de diesel par semaine que leur coûte leur groupe électrogène, simplement pour pouvoir prendre une douche et éviter que le contenu de leur frigo ne soit gâté (et tirer la chasse, aussi). Ce n’est pas le cas de tout le monde.

Tout cela a un avantage : fournir un sujet de conversation absolument inépuisable. Chacun se plaint de sa situation, explique en quoi elle est pire que celle des autres, compare ses factures, constate que bien qu’on ait moins de courant, et moins de consommation, elle a augmenté de 50%, on râle sur l’ancien ministre de l’énergie (qui s’est barré avec, je crois, 40 milliards) et le nouveau (le fils du président), on y va de sa rumeur (le mois de mars va être abominable, y’a un tanker qui attend d’être payé pour livrer son fuel aux centrales), on se demande comment ça se fait qu’il n’y ait pas encore eu de révolution de tous les gens qui ne peuvent pas travailler, on pronostique comment ça va tourner (mal), on raconte aux nouveaux les aventures avec la Sénélec, (le distributeur d’électricité), comme par exemple cet ami qui, lors d’une fête interrompue par une coupure de courant, a téléphoné à la Sénélec et expliqué que l’évêque de Dakar était venu bénir la baie de Hann et que c’était un scandale de couper à ce moment-là, et a obtenu un retour instantané de l’électricité…

Avec tout ça, récemment, la réalisation m’est tombé dessus : j’en suis arrivé à ne plus me dire « ho merde, encore une coupure » quand, à peine rentré chez moi, j’appuie sur l’interrupteur et que la fiat ne luxe pas, mais à la place, je me dis « chouette, du courant » quand ça le fait, et ça me rend gai comme un pinson pour le temps que ça dure.

Enfin, c'était vrai quand j'ai écrit cet article. Aujourd'hui dimanche, le courant n'a été coupé qu'une heure depuis vendredi matin. Et ça, c'est flippant.

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21 février 2011 1 21 /02 /février /2011 23:42

Il était là, assis dans la paille, soufflant par les naseaux, me fixant du regard. Dans ses yeux noirs brillaient la haine ancestrale de son espèce pour la nôtre, une haine ressassée tout au long de sa vie, une haine farouche tétée au pis de sa mère. Et en face de lui, en face de ce produit parfait de millénaires d'évolution, en face de ce dernier rejeton en date d'une lignée ininterrompue de bêtes musculeuses, de survivantes, une espèce que même les tigres à dents de sabre n'avaient su éteindre avant qu'il ne soit trop tard, qu'étais-je ? Un malheureux stagiaire, transi, hagard, et même pas armé.

 

Tout avait commencé d'une manière si anodine. Au petit-déjeûner, Laurent, mon maître de stage, m'avait lancé entre deux bouchées de boudin noir « T'iras vouere dans la grande stabule, eul' Noiraude a mis bas c'te nuit, tu m'foutras l'viau à la niche. (1)».

 

Ces quelques paroles, prononcées du ton bourru du paysan haut-marnais, ne laissaient pas entendre que j'allais avoir affaire à un psychopathe homicide.

 

Je mis mes bottes, enfilai mon manteau, et sortis de la ferme. Le soleil ne s'était pas encore levé, et l'air glacé me piquait le visage. Arrachant chaque pas à une boue dont la froidure saisissante transperçait mes bottes, je m'avançai vers l'étable, et, dans un grincement sinistre, j'en ouvris la grille.

 

Je restai un moment debout à l'entrée, sur la paille souillée, le temps que mes yeux s'accoutument à l'obscurité.

 

Mon adversaire m'attendait, couché près du mur. A mon premier pas sur son territoire, il se leva, lentement, faisant craquer ses articulations, et fixa sur moi ses yeux noirs. Je n'eus qu'à peine le temps de songer au premier paragraphe  de cet article avant que son instinct de tueur ne prenne le dessus sur une éventuelle crainte qu'il aurait pu ressentir devant un être qui le dépassait de la tête, des épaules, du torse, des hanches et des cuisses.

 

Il se jeta sur moi, tête en avant, pour me cogner au niveau des genoux, me faisant trébucher, et, profitant de mon déséquilibre, m'en remit un un peu plus haut. Je sifflai « petit salaud ! » entre mes dents, essuyai d'un revers de main le sang qui me couvrait le visage (2), et me relevai lentement.

 

Nous nous toisâmes du regard pendant quelques instants. Puis je poussai un hurlement inarticulé, la caméra sauta sur la gueule écumante du veau dont le beuglement fit trembler les murs, et nous nous jetâmes l'un sur l'autre, au son d'une musique hard-rock. La lutte dura de longues minutes, jusqu'à ce qu'enfin, je réussisse à le saisir par le milieu en grognant, et à le soulever à bras-le-corps pour tituber jusqu'à la niche où je le posai avec plus d'égards qu'il ne méritait. J'eus d'ailleurs à peine le temps de le mettre par terre qu'il se reprécipitait sur moi pour me pousser dehors à coups de tête et tenter de s'échapper. Heureusement, je réussis, à mon corps défendant, à refermer la niche en bloquant l'entrée avec des planches.

 

Je n'aurais jamais cru qu'un veau né cinq heures plus tôt puisse être aussi vicieux et costaud. Meme un croisé limousin.

 

Ce ne devait pas être la dernière fois que j'allais devoir lui faire face. Un peu plus tard, j'ai été chargé de lui apprendre à téter au biberon, puis chargé tout court, dans la niche, une fois de plus. Hé ben quand on est courbé en deux dans une boite fermé derrière soi par des planches, c'est impressionnant. Quelques jours plus tard, il réussissait à s'enfuir de la niche, on a jamais compris comment.

 

Honnêtement, ces animaux sont dangereux. Ils représentent une menace sérieuse pour l'humanité. Ils nous haïssent. Faites un geste pour notre survie. Mangez du boeuf.

 

  1. je l'appelle la Noiraude par licence poétique. En fait, son vrai nom devait être 21367, ou quelque chose comme ça. Et par ailleurs, Laurent, mon maître de stage, était tristement dépourvu du moindre accent péquenot.

  2. Une partie de cette séquence est un poil romancée. Pour ne pas nuire à l'action et au caractère dramatique de l'épisode qui se déroule dans ces lignes, j'ai omis de préciser que cette saloperie de bestiole était couverte de restes de placentas, et surtout de bouse. J'ai gardé mon manteau tel quel pendant quelques mois, comme trophée.

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3 février 2011 4 03 /02 /février /2011 20:42

Ha bé tiens, il y a quelques jours, j'ai fait un truc dont je suis plutôt fier, une fois n'est pas coutume.

Bon, c'est pas quelque chose qui va changer le monde, ni même ma vie, mais bon, je suis content de moi, et c'est assez rare pour que je vienne me la péter ici, youpi.

 

J'ai fait des études, il y a de cela maintenant des temps immémoriaux. A Rennes. J'y avais bu des bières, transporté des enceintes, surveillé une bédéthèque, appris des choses sur les vaches et rencontré un tas de chouettes gens.

 

Puis on s'est quittés. Et pendant des années, j'ai attendu que cette bande de crevards reprennent le contact. Je leur ai laissé leur chance, hein ! Je me connectais en visible sur MSN, même. Mais non. Rien. Ou presque. Y'avait bien quelques parisiens dans le lot, que je voyais de temps en temps, qui valaient mieux que les autres. Mais dans l'ensemble, j'avais laissé tomber cette bande de rats. Je m'étais fait des encore plus chouettes copains sur internet, des que j'avais choisis, pas qu'on m'avait imposés comme voisins pendant trois ans, et qui allaient jusqu'à m'inviter à aller boire des bières à Paris.

 

Mais bon.

Je me suis rendu compte qu'en fait, les gens qu'on nous impose comme ça, c'est un peu comme la famille : on les choisit pas, mais bon, en fin de compte, ben ils sont là, et on peut pas trop faire comme si non. (j'ai une vision assez idyllique de la famille, je sais.)

 

Du coup, j'ai pris sur moi (si, putain, si je vous jure) et j'ai envoyé à tous ceux dont je me disais que peut-être éventuellement ils se souviendraient de moi un grand long mail verbeux pour leur reprocher de pas m'avoir écrit donné de nouvelles depuis tout ce temps, bande de salopard(e)s.

 

Ben bizarrement, ça a marché. J'ai reçu des nouvelles. Pas encore de tout le monde, hein, pour le moment c'est juste ceux qui valaient le coup qui ont répondu. Mais je ne désespère pas encore des crevards qui restent. J'ai une technique : le harcèlement par mail de nouvelles verbeux.

 

Bon, du coup, à écrire tous ces mails, j'ai moins de temps pour le blog, c'est triste hein ?

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18 janvier 2011 2 18 /01 /janvier /2011 10:30

Nombre de geeks, dont, me dit-on, je ferais partie, ont fait leur le motto de Winston Churchill : « no sport ». Personnellement, à cela j’ai ajouté un régime saucisson-Princes de Lu® (qui remplacent avantageusement le whisky-cigare, du moins du point de vue pécunier), et j’ai ainsi pu développer cette panse confortable et légèrement bloblotante, du genre qui rassure les filles (si du moins j’en rencontrais), et les genoux en verre qui l’accompagnent.

Cependant, depuis quelques temps, deux choses se combinent pour me forcer à sporter : la radinerie et la flemme. Oui, c’est un peu paradoxal, surtout pour la flemme, mais c’est comme ça. Permettez que je vous explique.

 

Le matin, je suis fatigué. J’ai les paupières qui collent, les épaules voûtée, l’haleine canine et la langue molle. Et donc, un des trucs qui m’insupporte le plus, le matin, c’est de devoir parler à un taxi. (en relevant la tête, en plus. Et salamalikoum, alikoumsalam, ça va bien, bien merci, je vais là-bas, sur la route de Front de Terre, pas loin de la SDE, c’est juste à côté, 500 francs ça va ? quoiiii ? 500 francs c’est trop petit ! bon 800 800 c’est trop petit, il y a des embouteillages on dit 1000, 1000 c’est bien quoiiiii c’est trop cher deh, quand je vais à Belair, c’est trois fois plus loin et la route est pourrie, je paye 1500, allez on dit 1000 y’a les embouteillages, à cette heure-ci y’a plus d’embouteillages, les embouteillages c’est entre 7h30 et 8h, là ça va y’en a plus, non 1000 ça va bon OK on dit 1000 mais y’a pas d’embouteillages tu vas voir, d’ailleurs tu le sais aussi bien que moi.

 

Epuisant.

 

Rien que d’y penser, ça me soude la mâchoire et me fait tomber la tête sur la poitrine. Alors, pour éviter ça, la seule solution que j’ai trouvée, c’est de marcher jusqu’au bureau.

Et donc, je marche. 40 minutes. Dont une bonne partie sur le sable. C’est crevant, de marcher sur le sable, mais le sable essaye pas de te détrousser, du coup, en ce moment, je le fais presque tous les jours. Parce que quand c’est pas la flemme, quand j’ai tout le jus d’une pomme cajou bien mûre, c’est ma pingrerie qui prend le relais. Je me fixe un plafond de 800 francs pour le taxi, et je refuse de descendre en dessous, parce que bon, faut pas déconner, Belair trois fois plus loin route pourrie, 1500 balles, quoi. Alors là, 800, c’est bien payé. Surtout pour des mecs souvent chiants qui mettent la radio en wolof. Du coup, la conversation donne « salamalikoum, alikoumsalam, ça va bien, bien merci, je vais là-bas, sur la route de Front de Terre, pas loin de la SDE, c’est juste à côté, 500 francs ça va ? quoiiii ? 500 francs c’est trop petit ! bon 800 800 c’est trop petit, il y a des embouteillages on dit 1000, 1000 c’est bien quoiiiii c’est trop cher deh, quand je vais à Belair, c’est trois fois plus loin et la route est pourrie, je paye 1500, allez on dit 1000 y’a les embouteillages, à cette heure-ci y’a plus d’embouteillages, les embouteillages c’est entre 7h30 et 8h, là ça va y’en a plus, non 1000 ça va bah tant pis, je prendrai un autre taxi, va-t-en VROUM.

Arrive un autre taxi, qui passe la tête par la fenêtre avec un geste interrogatif, je vais vers lui, salamalikoum alikoumsalam bien merci ça va ça va bien bien merci je vais sur front de terre, à côté SDE, 500 francs ça va hiiiii c’est trop petit deh, 1500 ça va 1500 c’est trop cher allez on dit 800 800 c’est trop petit deh bon ben tant pis VROUM.

Un troisième se gare derrière celui qui est encore en train de partir : salamalikoum Front de terre pas loin avant la SDE 600 ça va VROUM. Connard.

 

Du coup, je décide que merde, je vais pas me laisser avoir et perdre mon temps, j’y vais à pied. Je vais pas leur lâcher 200 balles, quoi, merde. (ne croyez pas que je ne me rends pas compte de la mesquinerie qu’il y a à négocier pour 30 centimes d’euro, c’est une question de principe)(quoi qu’en fait non, je ne me rends compte de la différence de valeur qu’après m’être énervé et les avoir envoyés chier).

 

Et me revoilà à transpirer sous le cagnat tropical pendant trois quarts d’heure, avant de rejoindre, gluant de partout, mon bureau climatisé. Sauf que des fois, comme hier matin, y’a coupure. Et au lieu de bosser, je me retrouve à griffonner des notes de blog sur le bloc-notes de l’équipe (il faut vraiment qu’on aille faire des courses).

N’empêche, hein, 1h20 de marche sous le soleil et sur le sable, cinq fois par semaine, ben mine de rien, ça m’a pas fait perdre un gramme.

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22 décembre 2010 3 22 /12 /décembre /2010 16:42

[censuré]

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11 décembre 2010 6 11 /12 /décembre /2010 11:42

Bon, les aminches, me revoilà en France. Oué, la mère patrie, la douce France aux seins laiteux qui nous abreuve de son amour passionné et de son picrate labellisé, tout ça tout ça.

Ce que ça fait d'être en France après un an couasiment jour pour jour passés dans la touffeur tropicale de l'Afrique millénaires aux charmes bigarrés et croupelus, à transpirer sous l'ardeur agressive d'un soleil zélé ?

Pour être tout à fait franc, la première sensation qu'il m'ait été donné d'éprouver lors de mon retour est cette espèce d'anxiété, approchant la panique, que l'on lit dans les yeux des demoiselles fouillant fiévreusement leur sac à main en marmonnant « bon sang, où est-ce que je l'ai mise ? Je l'ai laissée là ce matin, j'en suis sûr ».

Oui, c'était tout à fait ça, sauf que c'était en explorant à tâtons, de mes deux mains tremblantes, les profondeurs insondables de mon caleçon sans y retrouver ce que j'avais l'habitude de dégainer sans même avoir à y réfléchir, à savoir, vous l'aurez deviné, ma bite. (j'ai essayé d'y mettre les formes, mais bon, à trop vouloir prendre des gants avec la sensibilité du public, je risque de ne pas me faire comprendre, et ce serait regrettable. Je ne voudrais pas qu'on croie que je prends mon calbute pour un sac à main, où je rangerais mon stick à lèvres goût cerise, un stylo à plume ébréchée, le dernier Marc Levy et mon téléphone portable griffé Hello Kitty. Non, je n'y mets que ma bite. Et un petit sapin vert désodorisant, pour garder une fraîcheur alpine.)

 

Ce n'est bien sûr pas que le froid qui m'a marqué à mon retour en France. D'ailleurs, personnellement, je me suis rendu compte à mon plus vif contentement que je ne trouvais pas qu'il faisait si froid que ça, et que je pouvais sans problème quitter l'aéroport en T-shirt sous la neige. Bon, depuis, j'ai chopé la crève, j'ai le nez qui coule et un mucus gras m'obstrue la gorge en permanence, mais au moins, j'ai pu me la péter quelques instants, et c'est bien là le plus important.

Ca me ferait quand même chier que cette saleté de rhume, couplé avec les vingt centimètres de neige qu'il est en train de tomber à l'heure où je tape ces lignes sans savoir si je pourrais les mettre en ligne, m'empêchaient d'aller demain à la soirée qu'on m'a présenté comme étant « sur le thé russe. Mais normalement, y'aura de la vodka russe, et des mannequins russes, aussi. Et on pourra ramener du thé russe ». Et j'a-dore le thé russe.

 

Mais bon, disais-je, il n'y a pas que le froid qui m'ait marqué, il y a d'autres choses, et je ne parlerai ici que de celles qui m'ont marqué en bien, parce que quand même, jusqu'ici, cette note fait sauvagement citoyen irresponsable qui n'aime pas son pays (et qui d'ailleurs l'a quitté), et je ne voudrais pas que l'on croit que c'est le cas.

 

Voilà donc pêle-mêle quelques-uns des trucs géniaux que j'ai retrouvé en France : en premier lieu, la possibilité de boire au robinet, sans craindre pour la stabilité de son transit intestinal. C'est un peu magique. En plus, l'eau est bonne. Dans le même ordre d'idée, j'allais mettre aussi la possibilité de faire la vaisselle à l'eau chaude. C'est vrai que c'est bien agréable d'avoir deux robinets dans la cuisine, mais en fait, je m'en fiche, je suis devenu bourgeois et j'ai une femme de ménage qui fait ma vaisselle (à l'eau tiédasse imbuvable).

 

On peut citer aussi le fait de pouvoir aller sur la route et respirer à plein poumons. En fait, j'ai presque envie d'aller téter les pots d'échappement, tellement ils me paraissent doux et gentillets comparés à l'épaisse soupe de goudron qui s'écoule des pots d'échappements des voitures sénagalaises et s'étalent en flaques sur les pistes (je crois que c'est comme ça qu'ils ont fait leurs autoroutes).

 

Il y a aussi l'absence de moustiques, qui est un atout non négligeable de notre beau pays. Pouvoir laisser la porte de sa chambre ouverte la lumière allumée, c'est un privilège que vous ne vous imaginez pas. Je peux passer des heures dans le couloir, à regarder la porte ouverte donnant sur le foutoir de ma chambre glorieusement éclairé par une ampoule de 100 watts au moins, sans qu'un seul moustique ne rentre (ça a aussi l'avantage de me permettre d'accéder à mon lit sans avoir à me battre avec la moustiquaire, puis vérifier qu'elle est bien hermétique, et braquer une lampe de poche dans tous les coins pour m'assurer qu'il n'y a AUCUN moustique qui ait réussi à s'introduire, puis ressortir chercher du Baygon vert et bien arroser l'intérieur, puis recommencer l'opération de vérification, parce que pour sortir de ma moustiquaire, j'ai dû la soulever, et il peut y avoir de ces saloperies de moustiques qui en ont profité pour se glisser à l'intérieur pendant que je regardais ailleurs).

 

Mais passons aux choses les plus importantes : de un, pouvoir prendre une douche avec de la PRESSION. Vous n'imaginez pas (tous) le supplice de devoir livrer son corps à une douche qui tousse. Un filet d'eau crapoteux vous coule sur le corps, laissant des traînées dans la poussière, et il faut se tourner et se retourner pendant des heures (en tuant les moustiques qui vous tournent autour) avant d'être sûr d'avoir fait le tour et d'être à peu près propre partout (j'ai résolu ce problème en ne me lavant qu'une fois par semaine, le dimanche, si y'avait rien à la télé. Au moins, j'étais uniformément sale, sauf dans le dos, avec la sueur qui coule).

 

Puis il y a le bain chaud. Ca faisait une éternité que je n'avais pas pris de bain chaud. (Mes logeurs avaient bien deux baignoires dans la masure où ils m'ont hébergé neuf ou dix mois durant, mais ils m'avaient menacé des pires sévices si je m'en approchais à moins de dix mètres. Ils avaient mis un bracelet électronique à ma cheville, et un GPS dans la baignoire, qui se mettait à siffler si j'entrais dans le périmètre interdit). Là, j'ai pu. Avec un bon bouquin. J'ai pu laisser la baignoire se remplir peu à peu, regardant au loin monter l'eau entre mes orteils, tandis que l'îlot graisseux formé par ma bedaine proéminente voyait ses rives diminuer dangereusement, forçant les puces et les poux à se frayer un chemin entre les poils pour se réfugier autour du cratère de mon nombril, avant d'être emportés par les flots tumultueux et fumants, dans une vague de bien-être criminel. L'extase.

 

Ben voyez, j'y retourne, tiens.

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1 décembre 2010 3 01 /12 /décembre /2010 09:42

La plupart d'entre vous le savent déjà, je suis un putain de gros sentimental. Ouais, on se change pas, hein.

Du coup, de me rendre compte là, d'un coup, que je vais devoir quitter le bureau dans lequel je passe mes journées depuis un an, ça me fiche un vieux coup de bourdon derrière les oreilles. Je m'y étais attaché, comme à un petit enfant lépreux que j'enjamberais tous les jours, régulièrement, sans oser lui jeter un regard ou un sou, mais qui serait mon petit lépreux. C'était mon bureau. Je le partageais avec deux ou trois autres personnes, certes, mais c'était quand même le mien. J'arrivais tous les matins en taxi, ça me prenait entre cinq minutes et quarante-cinq, si le taximan s'était mis en tête que le Bel-Air que je lui indiquais comme destination était du côté de Philadelphie et hanté par Will Smith (ça semble arriver relativement souvent. Ce matin encore, le taximan essayait de me convaincre que Bel-Air, où je vais depuis un an, que je donne comme adresse depuis un an, et qui est l'intitulé officiel du centre de recherches que je fréquente, c'était pas là, et que je lui avais mal indiqué. Hahum. Bon, mettons que nommer Bel-Air un quartier traversé par la route des Hydrocarbures n'est certes pas très logique, mais quand même.)

J'arrivais donc, je contournais la Case de l'Amiral que je pénétrais par derrière (oui, nous logions chez l'Amiral, on était pas n'importe qui), je grimpais les escaliers, empruntais un couloir sombre, arrivais au bout en tâtonnant, guidé par le ronronnement de l'onduleur qui voulait dire « va, n'aie crainte, internet t'attend », puis bifurquais pour arriver au bout du bout, je fouillais dans ma poche, en extrayais ma clé avec son trombone-porte-clé, l'insérais dans la serrure, tournais à l'envers, allumais la lumière et entrais dans mon antre où je posais mon sac, allumais mon ordi puis la climatisation antique qui crachait son air froid avec des râles d'asthmatique agonisant, avant de m'affaler sur mon fauteuil pour une nouvelle journée intense à mater la petite culotte de la fille dans le caddie sur l'affiche d'en face (Merci la Vie. Titre approprié.)

 

J'aimais bien mon bureau. Il avait une petite touche museum du XIXème, avec son éclairage poussif au néon qui illuminait difficilement la pièce obscurcie par ses rideaux à fleurs aux tons pastels, avec ses étagères en bois montant jusqu'au plafond et couvertes de bouteilles en plastique pleines de machins indiscernables dans leur placenta formolé, qui traînaient là depuis des des temps immémoriaux, leurs étiquettes indéchiffrables depuis longtemps, oubliées même des personnes qui les avaient recueillies. Il y avait des vieux coquillages puants dans un seau planqué dans une armoire, puis des trucs, et des machins dans des vieux sacs déchirés et poussiéreux, de vieilles blouses datant d'avant le changement de nom de l'institut et inutilisées depuis, des halogènes bancals, des cartons avec des vieilles grolles pleines de terre, et partout, l'odeur de la sueur rance du thésard acharné.

 

Le quitter sera dur, c'est pourquoi j'ai décidé d'en garder un peu avec moi.

Nous avons fait un grand ménage. Apparemment, ça faisait un bail que ça avait pas été fait (le patron avait demandé que ce soit fait en 2006, quand il rentrait en France, mais bon, y'avait plus urgent, hein, on fait de la Science dans un institut de recherche, hein!).

Et au passage, j'ai donc (avec l'autorisation du Très-Haut) emprunté les machins qui servent à rien, mais que bon, quand même, quoi, je voulais pas les vouer aux gémonies des dépôts d'ordures dakarois (et que comme dit le Patron, à la poubelle ou chez moi, c'est pareil. Merci Patron).

 

Me voici donc le fier propriétaire d'un petit tas d'émetteurs à la con, jamais utilisés et inutilisables depuis longtemps. Des machins qu'on introduisait dans le bide des poissons (des gros poissons, quand même). On ouvrait avec un scalpel, puis schlouip, on mettait ce machin gros comme une pile AA, on laissait sortir le fil pour émettre, et on recousait, puis hop, à la baille l'aïmara. Et après, on pouvait le rechercher avec une antenne réceptrice.

 

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Là, j'ai mis un Prince de Lu pour avoir l'échelle. Oui, ça ressemble un peu à un Tampax, ce truc. Sinon, vous aimez le motif de mon canapé ? Je le trouve chaleureux, moi.

 

Mais c'est pas tout, hein ! J'ai aussi un magnifique Topofil Chaix, ou mesureur à fil perdu. En gros, un machin qui tire un fil derrière lui pour mesurer des longueurs, et même des largeurs.

 

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http://img600.imageshack.us/img600/1705/p1070786.jpg

 

Bon, il n'y manque que le fil. Certes, ça le rend totalement inutilisable, mais au moins, il est joli et poussiéreux, et c'est bien ce qui compte.

Comme pour ce machin, là. Il a un écran et des boutons, et un papier collé dessus pour expliquer ce que ça fait d'appuyer sur les boutons, alors j'ai pas pu résister, quoi. D'autant que y'avait un fil qui se branchait dessus avec une prise bizarre, hein !

 

http://img560.imageshack.us/img560/719/p1070787.jpg

 

Apparemment, ce serait une machine pour rentrer directement les données de pêche ! Trop génial !

Il a été en service jusqu'à ce qu'on se rende compte qu'on trouve une technologie plus adaptée, permettant une plus grande fiabilité des données récoltées et une correction a posteriori (connue sous le nom de « du papier et un crayon à papier », technologie encore utilisée de nos jours).

N'empêche, je l'aime, ce Microscribe plein de boutons, moi. Et je le garderai !

 

Puis j'ai aussi trouvé un autre machin. Encore mieux ! Parce que je pourrai l'utiliser ! C'est une magnifique combinaison une pièce. On n'a pas compris à quoi elle servait, mais elle est classe ! Et ça vient du Luxembourg, hein !

 

À mon avis, c'est au cas où on rencontrerait des ET sur un estuaire sénégalais. On n'est jamais trop prudent, quand on est Scientifique.

 

http://img52.imageshack.us/img52/5307/p1070791g.jpg

 

Ç'aurait été ballot de laisser passer tout ça, quand même.

Maintenant, je m'en vais, le déménagement s'annonce, les larmes couleront sur mon visage, mais mon coeur sera quand même un peu apaisé par le fait d'être équipé si jamais je tombe sur un alien. Et d'avoir un tas de cochonneries qui encombrent mes étagères.

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6 novembre 2010 6 06 /11 /novembre /2010 10:42

Je n'étais qu'un égoïste, un loup solitaire. Je ne rendais de compte à personne, ne servais en rien la société dont je répugnais à faire partie. Je passais mes soirées à hurler ma solitude à la lune d'internet, la revendiquant comme un trophée couronnant ma liberté d'esprit.

 

Mais j'ai pris conscience de la détresse du monde, et j'ai décidé de changer. De rendre non pas ce que je dois, car les loups solitaires ne doivent rien, mais ce que je veux. Et ce que je veux, c'est mettre fin à la misère qui règne partout !

Misère, prends gare à toi, j'arrive tous crocs dehors !

 

Il m'a cependant fallu faire un choix, car tout loup que je suis, je ne suis qu'un homme, et de mes deux seules mains je ne peux étrangler comme je le voudrais l'hydre plurimillénaire et polycéphale qu'est cette misère honnie.

 

Ordoncques, je n'ai que deux mains, je n'étoufferai donc que deux têtes, pour le moment. C'est déjà pas si mal. Qu'est-ce que vous faites, vous, hein, confits dans votre confort, achevant de vous avachir dans vos vies avides d'avilissage volage et chauviniste ? Ha !

 

La première des misères à laquelle je m'attaque est la misère intellectuelle. Je la combattais déjà par ce blog, cette lueur de beauté et d'amour de l'art scintillant tel un phare ténu dans l'immense océan des tempêtes de l'internet crétinisant. Je lui porterai de nouveaux coups au coeur au cours du quart de permanence que je prendrai chaque semaine à la bibliothèque de la Paillotte, l'association de la boite, qui gère le Noël des gens qui travaillent et l'achat des bières pour le bar des stagiaires. Je serai le gardien de notre mère Littérature. J'ai déjà commencé, d'ailleurs. J'ai déjà eu quatre visiteurs (la présidente de l'association, son mari et leurs deux marmots). J'ai déjà pu faire oeuvre de conseil avisé et utile en la personne de le Petit Nicolas que mais vas-y, prends-le si vraiment ton môme est trop petit pour La potion magique de George Bouillon, et s'il aime pas, t'y fileras trois claques. (tenez, si ça vous intéresse, dans cet ordre d'idées, j'ai commencé ma liste des bouquins pour mômes indispensables, puisque ce sont mes préférés, elle est ici, là, si vous arrivez à cliquer).

 

Ca fait du bien de se sentir pourfendre l'inculture tout en se lisant un petit Gil Jourdan (hé, je connaissais pas Gil Jourdan, enfin, j'en avais jamais lu, c'est pas mal). En plus, on a cette sensation de toute-puissance quand on est dans le siège devant l'ordinateur, et qu'on a le droit de brailler « moins fort ! C'est une bibliothèque ici, et la pièce fait neuf mètres carrés, je te rappelle, petit morveux ! »

 

J'aurais pu m'en tenir là dans mes services à la communauté, mais c'est mal me connaître. Quand je commence, on m'arrête plus, je suis un ouf malade moi, je vote pas Bayrou. Du coup, quand un brave homme a demandé sur un réseau social « hey, ça dit quelqu'un de faire de la traduction de webcomics ? », j'ai répondu avec un enthousiasme mal contenu « oué, pourquoi pas, si ça peut aider. »

 

Et je me retrouve donc à traduire un webcomic d'heroic-fantasy porno. Je prends mon devoir très sérieusement. Car comment faire reculer la misère sexuelle (et hop, deuxième tête !) des adolescents francophones geeks boutonneux (parce que bon, pour lire de l'heroic-fantasy porno, faut quand même être un peu geek), si ce n'est en leur donnant accès à un contenu cochon de qualité avec en prime l'excuse « nan mais bon, quand même il y a une histoire hein, avec en plus des sorcières bonnasses » ? Car l'adolescent geek est quand même un peu effrayé par le vrai porno, et il a bien raison.

 

Je n'ai qu'un seul regret : ne pas avoir pu placer l'excellent jeu de mots que j'avais trouvé pour désigner une petite boule de sperme à qui une sorcière a donné la vie, qui était donc un « élémental de foutre ». C'était rigolo pour les geeks, je trouvais, mais bon, ça rentrait difficilement. Dans les bulles, je veux dire. C'est la partie chiante du boulot : trouver une police adaptée, avec des accents, et traduire de manière à ce que ça déborde pas des bulles comme la [tuut] des personnages de leur pantalon.

 

Mais bon, j'y arriverai. C'est un sacerdoce. Je le fais pour le monde.

 

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16 octobre 2010 6 16 /10 /octobre /2010 19:42

Ce blog a une dimension scatologique indéniable, j'en suis conscient et, croyez-moi, je le déplore autant que vous. Je voulais en faire un espace de création littéraire et poétique, où fleuriraient la beauté du mot et l'aisance du style. Au lieu de cela, j'en ai fait une véritable fosse à purin. Je ne sais combien d'articles ont trait à la merde de près ou de loin, mais je crois pouvoir estimer sans trop de risque ce nombre à un sacré gros paquet.

 

C'est bien triste. Mais bon, ce blog, comme pour beaucoup de gens, me sert d'exutoire. J'y traite de mes passions, de mes envies, de mes joies et de mes peines. Et de mes terreurs.

 

Et il faut bien reconnaître qu'au rang actuel de mes terreurs, celles qui font un enfer (grassement payé) de mes missions de pêche scientifique sur le delta du Saloum au milieu des mangroves, au rang de ces terreurs, la pire n'est pas celle des crocodiles (il paraît qu'il y en a), ni celle des ouragans (on n'est pas passés loin), ni celle d'une bavure des militaires français en entraînement commando dans le coin.

 

Non, la terreur la plus tenace est celle du pet.

Car je suis timide du sphincter, et l'idée d'avoir à faire au su (et presque vu) de tous des acrobaties par dessus le bastingage avec un harnais sous les aisselles comme seul protection contre la chute dans l'eau et mon étron me donne le mal de mer. Et je n'aime pas non plus caguer dans la nature, quand j'ai toujours en tête la crainte (sans fondement, mais même) qu'au lieu d'un étron bien moulé qui tombe proprement loin derrière mes chaussures, je risque de voir couler mon caca le long de mes mollets, s'engluer dans mes poils et finir par se perdre entre mes doigts de pieds, à cause des crevettes un peu passées que mon tonton a insisté pour acheter l'avant-veille de mon départ.

 

Du coup, depuis la dernière mission, j'ai décidé de conserver mon manger dans mes boyaux. Ce n'est pas facile, mais l'Imodium aide en bloquant mon péristaltisme (que j'ai toujours trouvé dégoûtant, soit dit en passant). N'empêche que ça gamberge dans la tête : je me retrouve à tenter de calculer la quantité de matière qui s'accumule au cours des repas de cinq jours, le temps qu'elle va y rester, et à me demander dans quel état les boulettes de viande se trouvent et à quel niveau de mes boyaux. Et surtout, je serre les fesses, et vis dans l'appréhension de la sensation du pet qui demande à sortir. Car le pet, dans ces conditions extrêmes, est risqué. Je sens qu'à chaque instant, il est susceptible de passer d'une innocente émission de gaz à une coulée poisseuse dans le caleçon. Je me crispe de tout mon corps, et j'attends que ça passe. Mais c'est usant. Épuisant, même, psychologiquement autant que physiquement. Sans compter qu'il faut faire avec les discussions interminables sur le ténia d'un collègue ou l'amibiase à diarrhée sanglante d'un autre.

 

Heureusement, la mission n'est pas vécue que dans l'anxiété du pet foireux. Outre les découvertes de beaux poissons, la mission est mère de souvenirs que je chérirai longtemps. Comment oublier, par exemple, la sensation sans égale que j'ai pu ressentir lorsque, seul à la proue du bateau dans la tempête, le vent et la pluie fouettant mon visage, l'oeil fixé sur l'horizon où ciel et mer se mêlaient dans une brume pluvieuse à la luminosité étrange, je plongeai la main dans mon caleçon pour en extraire un sexe fumant que je pointai droit devant moi, face à l'orage, m'accordant un instant de méditation avant de lâcher les vannes.

À cet instant, j'étais le soliste d'un concerto de mère Nature pour orage et jet de pisse. Par d'audacieuses contractions de la vessie, j'apportai un contrepoint aux coups de tonnerre qui ébranlaient la mangrove, la lueur des éclairs apportant une touche baroque à ce tableau sonore majestueux, avec pour seuls spectateurs les nuages sombres et la nuit noire, mes collègues étant trop occupés à siroter leur pastis vespéral. Le moment m'appartenait, et pour la première fois, je me sentais part du grand Tout. Je ne savais plus si le ruissellement qui sillonnait mon visage était constitué de larmes d'émotion, de la pluie battante, ou la simple conséquence d'un pipi vent debout.

 

Quoi qu'il en soit, je ne regrette rien.

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