Résumé des épisodes précédents : Bon. Après être partis en passagers clandestins sur un bateau saoudien pour rejoindre notre stage sur l’île de Pâques, nous nous sommes retrouvés sur un radeau de
survie à manger des dauphins avec l’accent espagnol, avons échoué sur une île apparemment déserte mais avec des tortues quand même, et là, ben on y est encore.
Attention : malgré les apparences, Pierre n'a pas usé de substances interdites. Il est juste bizarre.
08/07/06
JUNGLE PARTY
Francis, qui a toujours des idées de génie pour ne pas avoir à supporter l’odeur de mes pieds a proposé qu’on se sépare pour explorer l’île, il est parti à gauche et moi à droite (rien à voir
avec la politique). On a prévu de longer la côte et de se retrouver en face. Becdepus le poulet de l’Inra a décidé de partir tout droit.
Pendant mon aventure je compte trouver des plantes médicinales afin de soigner cette infection plantaire qui ferait vomir les tripes d’une mouche a merde (Scathophaga stercoraria pour
les intimes) si elle ne mourrait pas d’asphyxie avant.
Afin de soulager Francis et de mettre de mon coté tout le matériel de survie, j’ai pris sur mon dos la pendule et j’ai laissé le soin à Francis de porter les peaux de dauphins.
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Marchand du pas lourd de l’homme portant une pendule sur son dos, je me dirigeais lentement vers l’inconnu…
Pas après pas je m’enfonçais dans cet enfer de verdure. Les mollets déchirés par les ronces je me frayais un chemin en dégageant les lianes à l’aide d’une branche. Lentement mais sûrement
j’avançais.
Une sueur moite coulait sur mon front détrempé, mes pieds en compote pourrissaient dans les chaussures usées et les fréquents regards que je lançais aux alentours pour assurer ma protection ne
faisaient qu’amplifier ma terreur.
Je suivais maintenant la côte depuis plus de deux heures et j’étais exténué. Seul le clapotis des vagues contre la falaise me persuadait que je ne tournais pas en rond. Je m’assis sur une des
rares souches exempte de fourmis et bus quelques gorgées d’eau tiède et acre de ma gourde en peau de dauphin. J’appréciait ces quelques secondes de détente dangereuse, puis je quittait ma
tranquillité pour reprendre la route, car j’espérais toujours rejoindre Francis, si il n’avait pas été tué par une mygale. Le regard hypnotique d’un serpent me tira de mes pensées. Surtout ne pas
paniquer… ne pas paniquer… surtout pas de panique….PANIQUE !!!!!!!!!!!
Je lâche la pendule et je cours à toute allure sans me retourner pour voir de quoi il en retourne.
Les branches me fouettent le visage, les lianes m’entravent, les troncs me barrent la route, je cours je saute je rampe je cours a nouveau. Soudain une racine plus perverse que ses congénères me
fait trébucher. Mes deux mains s’égratignent sur une pierre en tentant d’amortir ma chute, je saigne, j’entend siffler derrière moi, ça y est il est là il va m’étrangler de son corps puissant
avant de ma paralyser avec son venin, déjà je peux presque sentir son souffle glacé caresser ma peau moite. Un ange passe… puis deux puis trois… rien. Ce n’était que le sifflement d’une myriades
de moustiques attirés par l’odeur du sang qui s’affairent a piquer la pierre sur laquelle je m’étais écorché. Visiblement mes senteurs plantaires les avaient repoussés. J’attendis plus de 35
minutes pour pouvoir reprendre ma route car j’attendais que la sonnerie du réveil mécanique m’indique la position de la pendule. Dans sa chute elle avait écrasé le reptile qui agonisait dans une
flaque de sang. Par pitié je l’achevai après lui avoir crevé les yeux pour qu’il ne puisse pas contempler son sort. J’avais enfin de quoi dîner.
*** A partir d'ici vous devez être vaccinés contre les maladies de la jungle et la frousse pour
lire la suite***
Le sol devenait de plus en plus boueux, l’air de plus en plus lourd et l’odeur de mes pieds n’était qu’un parfum haut de gamme comparée à la puanteur qui montait de la terre. Mes jambes
s’enfonçaient à mi mollet dans un sol grouillant de créatures lombricoïdes et je dus m’arrêter fréquemment pour retirer les sangsues qui s’abreuvaient tranquillement de mon hémoglobine. Un filet
de brume blanchâtre flottait à quelques centimètres du sol et je n’entendais presque plus la mer, en me guidant à l’oreille je risquais de faire demi-tour involontairement. Je décidais donc de
faire un bivouac jusqu'à ce que la brume se dissipe. Malheureusement je ne pus me coucher sur ce sol instable de peur d’y être rapidement englouti, à moins d’y être dévoré par la faune rampante.
J’entrepris de grimper sur le tronc humide d’un arbre pour guetter l’horizon. A quelques mètres de là, un îlot plat de terre noire, faisait surface sur cet immense marais qui s’étendait à perte
de vu, je décidai de le rejoindre.
Plus je m’avançais et plus la puanteur m’insupportait, elle en vint même à me faire pleurer les yeux. Curieusement même la vermine semblait éviter ce lieu et lorsque je mis pied à terre, les
sangsues, confortablement fixés à mes jambes, se décollèrent pour aller s’enfouir dans la vase.
J’allais enfin pouvoir passer ma nuit en paix. Avant de m’installer, je jetai un dernier regard aux alentours pour m’assurer de ma tranquillité, la brume avait totalement recouvert le marais et
j’eu l’impression d’être au sommet d’une montagne. La fatigue mit tout de même plusieurs heures à vaincre mon inquiétude et à me plonger dans la torpeur.
Ile perdue au milieu de l’espace et du temps, tourne, tourne ; souvenirs éparpillés de rituels ancestraux, monstres oubliés revenant des profondeurs, voyage. Des hommes qui n’ont d’humain que le
corps chantent, appellent, les pierres se dressent, l’arche karstique infernale est en route. Blanc blanc, lumière blanche aveuglante stérile, néon de laboratoire irradiant, fumée toxique, néant
blanc, vide.
La vie fuit le vide noir. Une tête trop pleine explose, des rivières rouges coulent et ondulent au rythme brisé d’une mélopée psychédélique. Tournent, invoquent et dansent. Brûlent et sacrifient.
Lumière aveuglante, des flammes verdoyantes vibrent, chantent, dansent…
Un horrible mal de crâne me réveilla, la lune était déjà haute sur l’horizon et éclairait paisiblement le marais de sa lumière fantomatique. Cinq aiguilles de pierre noire se dressaient autour de
l’îlot, la fatigue m’avait sans doute empêché de les remarquer la veille.
A leur surface des fresques répugnantes étaient gravées. Des silhouettes changeantes se livraient à des rituels immondes et bestiaux. Leur observation ne fit qu’empirer ma migraine, les dessins,
sous la lumière changeante de la lune semblaient s’animer d’eux même. On pouvaient presque entendre les ombres floues, changeantes et tournoyantes hurler .
Si la nuit et la brume ne m’avaient pas empêché de quitter l’îlot je l’aurais fait sur le champ, je regrette toujours de ne pas avoir fui, quitte à m’être fait sucer jusqu’à l’os par une troupe
de sangsues sanguinaires. Prisonnier de l’île je ne pus me résoudre à une activité autre que la contemplation des cinq aiguilles de roches, qui m’attiraient irrésistiblement vers leurs
immondices.
Mes mains frottent frétillement la gangue noirâtre qui recouvre aiguilles cyclopéens puis percent maintenant la voûte céleste. La brume se dissipe, les bruits des créatures du marais laissent
progressivement place à une lente mélodie, je déchiffre toujours, le ciel est devenu entièrement noir, mais je vois de mieux en mieux, la musique monte, comme un cœur malade qui se rapproche, la
boue noire du marais disparaît et laisse place au vide. Quatre hommes se tiennent devant les autres piliers, je les regarde sans avoir la moindre action sur mon propre corps, la mélopée se
saccade et son écho rebondit éternellement sur les barrières de l’infini. Le sol gronde, au centre, à l’endroit ou j’étais allongé se tiens un fille complètement nue qui bouge son corps
désarticulé au son fou de la musique. L’atmosphère glaciale me brûle les poumons, une vibration étrange sort de mon corps incontrôlable, je chante sur cette musique de fous des paroles
incompréhensibles qui appèlent l’au delà.
La danse laisse place à la transe, toujours en mouvement, le corps de la fille se tord selon des angles impossibles. Tressautements fous, puissante vibration, rotations insensés, Dans la lumière
noire elle exécute les dernières passes de sa danse avec la mort.
La première giclée de sang brille d’un éclat vermeil alors que le coude vient de céder sous un mouvement trop brusque. Un collier de perles rougeoyantes tombe sur le sol et coule en palpitant au
rythme de la musique.
Le néant autour de nous s’enflamme, des flammèches rouges bleu et vertes flottent et dansent sur le rythme effréné de la mélopée. Elles se reflètent sur les chairs et dans les regards, leurs
éclats changeant se tatouent sur le corps de la danseuse. Un rugissement de plaisir sort de sa gorge tordue alors qu’elle fracasse lourdement sa tête contre le sol. Le crissement osseux rentre en
harmonie avec les chants rituels. Le flot écarlate coulant sur son visage à l’expression béate baigne son corps écartelé. La lune, perce le ciel noir, elle luit sur les blessures de son corps
meurtri. Sous la lumière blafarde, le rouge de son corps se mélange au noir de la terre. Sa tête se décroche du reste de son corps en un dernier mouvement empli de violence. La musique se calme
alors que les dernières gouttelettes pourpres tombent sur le sol.
Mes derniers souvenirs avant de quitter l’île sont ceux d’un visage sanguinolent gravé dans la pierre à mon effigie. Je ne sais si c’est la course parmi les feu follets du marais, ou bien mes
mains frottants les pierres ou encore les conséquence de ma chute mais mon corps est tout couvert de sang qu’une frénésie m’empresse de laver plusieurs fois dans l’eau putride du marécage.
Pierre qui va passer une bonne nuit en pensant à vos cauchemars.
13h00 (d’après le soleil)
J’ai convaincu Pierre qu’il valait mieux nous séparer pour explorer l’île. Je crois que je n’aurais pas pu supporter plus longtemps les émanations
fétides de ses pieds. Je pars donc sur ma gauche, en direction de la jungle.
18h00 (approximativement)
Cette jungle n’est pas aussi accueillante qu’on pouvait le croire. Depuis trois heures, je me traîne jusqu’à mi-mollet dans un sol boueux, putride,
qui donne l’impression de ne pas vouloir relâcher mes pieds. Chaque pas est devenu un supplice, mon genou blessé me lance atrocement, mais je dois avancer. Je suis entouré de part et d’autre par
une végétation dense, qui me cache depuis le départ le soleil. La lumière qui parvient à percer est diffuse et jaunâtre. Les arbres ont tous l’air à moitié crevés, étouffés par des lianes
bouffies qui éclatent au moindre contact, libérant un suc vert qui me brûle les mains. Pourtant, sans elles, je ne pourrais pas m’extraire de cette boue immonde qui veut m’absorber. Mes paumes
sont couvertes d’ulcères qui exsudent un liquide blanchâtre et forme une croûte qui de déchire à chaque fois que j’empoigne une nouvelle liane.
Mais le pire, ce doit être l’absence totale de bruit : pas un chant d’oiseau, pas un grognement de RTI (pourtant, ce devrait être leur lieu de
chasse favori), seulement la succion gargouillante de chacun de mes pas, ma respiration de plus en plus malaisée, le battement de mon cœur dans mes oreilles. Je commence à avoir faim, mais je
n’ai aucune provision.
? la nuit
Je me réveille en proie à une douleur fulgurante qui me traverse l’estomac, des crampes me prennent tout le bas-ventre, je vomis dans un spasme le
fruit pourri que j’ai eu l’imprudence d’avaler, accompagné de litres de bile qui me brûle la gorge. Je n’ai pas une goutte d’eau pour me rincer la bouche. Je crois que je vais me traîner ce goût
jusqu’à ce que je sorte de cette jungle…Si jamais j’en sors.
Plus tard
J’entends des bruits derrière moi. Je ne sais pas ce que c’est, mais je doute d’avoir envie de le savoir. Quelle que soit cette créature, elle
semble m’avoir repéré. Je me lève d’un seul mouvement, et je cours de toutes mes forces dans la direction opposée. La morve qui m’obstrue les narines m’empêche de respirer, elle m’aveugle même
quand je tente de l’évacuer, mais je cours, droit devant, rien ne m’arrête, rien ne peut me rattraper, c’est la course d’un homme fou de terreur, je survole les racines traîtresses, la vase n’a
pas le temps de me saisir, je suis plus rapide qu’elle, quand soudain, j’entends un sifflement, quelque chose me heurte la nuque, et je perds connaissance dans un éclair de lumière
blanche.
Le matin
Je suis réveillé par une douleur lancinante dans mes épaules, mes poignets, mes genoux. Je suis attaché par les poignets et les chevilles à un
bâton supporté à ses deux extrémités par deux créatures à la peau sombre. Le balancement de leurs hanches me fait supposer que ce sont deux femmes…Et merde, je me suis fait choper par des
gonzesses, des amazones qui, avec la chance que j’ai, sacrifient tous les mâles qu’elles trouvent à une déesse phallophobe en leur arrachant les parties génitales avec un couteau de silex. Mais
nous nous approchons de leur village…